Le rôle de la Coalition dans la protection des droits humains dans le contexte des crimes internationaux commis au Burundi.
1. Présentation de la Coalition
Depuis son indépendance, le Burundi a été souvent endeuillé par des crises cycliques dont les auteurs sont restés impunis. Cette situation a fait que le Burundi reste dans un cycle vicieux de violence.
L’accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi signé en date du 28/8/2000 avait prévu des mécanismes de justice transitionnelle pour remédier à cette situation. Malgré cet accord historique et la Constitution de 2005 qui en est issue, il est fort regrettable que depuis 2015, le Burundi est replongé dans une situation d’impasse suite à la volonté de Pierre NKURUNZIZA (Président du Burundi de 2005 à 2015) de briguer un troisième mandat illégal et illégitime en violation des textes fondamentaux du Burundi.
Les périodes sombres caractérisées par des tueries et violations graves dont légion, on citerait à titre d’illustration 1965, 1972, 1988, 1993 et 2015 et pour toutes ces périodes les crimes graves commis sont demeurés impunis.
Le Burundi a adhéré au Statut de Rome portant création de la CPI en 2004 mais curieusement suite aux multiples crimes commis contre le peuple burundais par les autorités actuelles du Burundi, ces dernières ont décidé, unilatéralement et en dépit de la volonté du peuple burundais, de retirer le Burundi du statut de Rome. Cette situation inédite met à mal la situation des milliers de victimes qui ne peuvent point recourir au système judicaire interne devenu un simple instrument de répression dans les mains de l’Exécutif burundais.
Conscientes de la précarité de la situation des droits humains au Burundi et dans le souci de faire face à l’inertie et l’inefficacité de la justice Burundaise qui était censée être gardienne des droits et libertés des citoyens et individus, et ainsi combattre l’impunité devenue endémique, les organisations de la Société civile ont décidé de créer la Coalition Burundaise pour la CPI en 2010 . La Coalition a été créée par les principaux organisations et collectifs de défense des droits humains au Burundi notamment l’APRODH, le FORSC, l’ACAT-Burundi, la Ligue ITEKA, l’OAG, CADRHO, et ABDP
2. Activités réalisées par la Coalition
La Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale a réalisé plusieurs activités que ce soir sur le plan national, régional ou international et se catégorisent comme suit :
A. Les activités de plaidoyer
La coalition a réalisé plusieurs activités dans le domaine de plaidoyer, et à titre d’illustration on peut noter :
- La participation dans des campagnes pour la quête de la justice, le respect des droits de l’Homme au Burundi : Elle a principalement participé dans diverses campagnes des ONGS Burundaises notamment la Campagne « Justice pour Ernest MANIRUMVA », les campagnes vendredi vert et mardi vert pour la libération des militants des droits de l’homme injustement incarcérées respectivement Pierre Claver MBONIMPA et le journaliste Bob RUGURIKA ;
- La Coalition a également alerté la communauté nationale et internationale sur le danger de la milice Imbonerakure, une jeunesse affiliée au partie CNDD FDD au pouvoir, et des autres crimes qui se sont commis au Burundi. Beaucoup de déclarations et communiqués de presse ont été produits à ce sujet. En début de 2015, la coalition Burundaise a conjointement écrit une correspondance adressée au Conseil de sécurité des Nations Unies pour l’interpeller quant à la Responsabilité de protéger le peuple burundais qui était sous menace d’un régime dictatorial ;
- La Coalition a donc également participé dans des cadres de concertation pour toute question en rapport avec la promotion et la protection des droits humains ;
- Au niveau régional comme au niveau international, la Coalition a été conviée à divers cadres de rencontre et d’action en vue de la promotion de la justice pénale internationale. En sa qualité de membre de la Coalition des ONGs pour la Cour Pénale Internationale, la Coalition burundaise a participé dans des rencontres initiées par cette coalition internationale ou dans des activités de la Cour Pénale Internationale ou de ses organes ;
B. Des activités de renforcement de capacité et d’information
Dans le souci d’améliorer la connaissance et l’information des Burundais quant aux activités de la Cour Pénale Internationale, la Coalition Burundaise pour la CPI a mené diverses activités d’information, de sensibilisation et renforcement des capacités. Ces séances ont été animées par des experts juristes dont des avocats et professeurs d’université qui œuvrent dans le domaine de la justice pénale internationale.
Ces activités ont visé le groupe cible ci-après :
- Les défenseurs des droits de l’Homme et activistes de la société civile ;
- Les magistrats et avocats ;
- Les journalistes ;
- Les Etudiants en droit ;
- C. La recherche et la communication
La Coalition Burundaise a mené des recherches et une documentation pour éclairer l’opinion nationale et internationale sur la situation des droits de l’Homme au Burundi. De même, des analyses juridiques pertinentes ont été faites toujours dans le souci d’éclairer sur les concepts, les situations et sur la nature des crimes qui se commettent au Burundi. Dans le même sens, une analyse sur la complémentarité de la CPI par rapport à la justice burundaise a été faite et le document y relatif a été communiqué au Bureau du Procureur de la CPI. Signalons à toutes fins utiles que la Coalition burundaise fait régulièrement des communications et entretiens avec le Bureau du Procureur de la CPI sur la situation du Burundi qui est actuellement sous examen préliminaire par le même Bureau.
D. Le monitoring et la saisine des mécanismes régionaux et internationaux de protection des droits humains
Compte tenu de la gravité de la situation des droits de l’Homme au Burundi, la Coalition Burundaise pour la CPI s’est donné une mission, conjointement avec d’autres organisations de la société civile et les avocats, de faire un monitoring de toutes les violations graves des droits humains et d’aider les victimes à saisir les mécanismes régionaux ou internationaux de protection des droits humains.
Ces activités permettent d’assister ou représenter les victimes des atrocités commises au Burundi devant la justice internationale et de lutter contre l’impunité des crimes internationaux commis au Burundi pour obtenir la condamnation des auteurs des crimes ainsi que les réparations civiles
Conclusion (Citation proposée)
Dans tout système politique soucieux d’assurer la libre jouissance des droits fondamentaux, la justice est un maillon essentiel de leur protection puisque c’est d’elle que la stabilité et la cohésion des structures étatiques dépend. Au Burundi, la mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire est la base d’une justice à double vitesse voire l’inertie avérée de tout le système judiciaire, avec à la clé la consécration de l’impunité ; l’explosion des violences cycliques, l’instabilité politique et l’impossibilité de tout projet de développement durable.
Ce dysfonctionnement de l’appareil judiciaire et l’un des terreaux de différents massacres de civils perpétrés au Burundi. Il est évident que la lutte contre l’impunité passe inéluctablement par la réhabilitation du pouvoir judiciaire dont l’indépendance est régulièrement mise à l’épreuve par l’exécutif.
Face à l’injustice, l’incapacité et l’inertie du système judiciaire prévalant au Burundi, l’engagement de la justice pénale internationale est plus qu’une nécessité afin de faire face à la gravité des crimes commis au Burundi. Ceci serait un avertissement fort à tous les criminels d’Afrique et du monde que la dictature et le crime ne doivent pas avoir un dernier mot. Comme cela a été le cas pour Hussein Habré qui vient d’être condamné à perpétuité pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et actes de torture commis entre 1982 et 1990 lorsqu'il était au pouvoir au Tchad, le régime de NKURUNZIZA (au Burundi) comme le reste des dictateurs au monde devraient se rendre compte que le temps de l’impunité n’est plus illimité.
« Si le milieu professionnel en charge d’une enquête est trop homogène, le risque de la pensée unique transformant une hypothèse en présomption puis en conviction, est important et celui qui se place à contre-courant traverse inévitablement des moments difficiles… ».